DEVOIR DE MEMOIRE

ORADOUR. Histoire, Vigilance et Réconciliation

Month: avril 2023

Compte rendu de l’Assemblée Générale Ordinaire du 4 mars 2023

Bernadette remercie les personnes présentes à cette Assemblée Générale rendue particulière par l’absence définitive de notre ami Robert et demande que soit observée une minute de silence en sa mémoire.

Les administrateurs ont proposé un dépôt de fleurs sur le caveau de Robert. Tout ceux qui le souhaitent peuvent s’associer à cette démarche à l’issue de l’AG.

Aujourd’hui 43 personnes sont présentes auxquels s’ajoutent 41 procurations. Le quorum est atteint et l’assemblée peut débuter.

Madame Sylvie Tuyéras, vice-présidente du Conseil Départemental représente Jean-Claude Leblois, président du Conseil Départemental et Pierre Allard conseiller Départemental et maire de Saint-Junien.
Fabrice Escure, président du Centre de la Mémoire est excusé.
Nous adressons nos chaleureux remerciements pour leur présence sans faille depuis des années à Sylvie Tuyéras, Annie Dardillac, Pierre Allard et bien d’autres encore.
Merci également à Benoit Sadry, nouveau président de l’ANFMOG, pour son adhésion et son soutien dès la première heure.
Merci aussi à Agathe et Richard Hébras. Robert savait qu’il pourrait compter sur Agathe pour prolonger sa parole.
Merci à Philippe Lacroix, Maire d’Oradour-sur-Glane, pour sa disponibilité, son écoute et ses conseils. Comme chaque année nous le remercions pour nous permettre de tenir notre assemblée dans cette salle.

La parole est donnée à Philippe Lacroix : « Il est de notre devoir, celui de la ville d’Oradour-sur-Glane, de vous accompagner. Nous n’oublions pas que l’association fut là à des moments difficiles de la vie de Robert et la ville vous en est reconnaissante ! »
Philippe revient sur l’hommage national rendu à Robert, qui fut à la hauteur du personnage. Une personne empreinte de simplicité. Il salue Agathe qui a repris le flambeau, lui précisant qu’elle pourra toujours compter sur la ville d’Oradour. Il ajoute que, si certains pensaient que l’association devrait stopper, lui, pense au contraire, qu’elle doit perdurer.
Le village en ruines se détériore. Nous continuerons d’en transmettre le témoignage avec l’ANFMOG, mais nous ne serons jamais trop nombreux pour en assurer le respect moral.
C’est pourquoi Philippe adresse un grand merci à l’association pour tout ce qu’elle a fait.

Bernadette reprend la parole pour rappeler l’origine de la création de notre association et rendre hommage à Robert.
Le 12 janvier 2013, se tenait ici l’assemblée constitutive de l’association « Justice Pour Robert Hébras » :  près de 300 personnes apportaient avec force à Robert Hébras tout leur soutien, toute leur amitié.
Robert avait chaleureusement remercié les participants. Il était profondément touché par cet élan de solidarité qui s’était développé depuis l’annonce de sa condamnation par la Cour d’Appel de Colmar en septembre 2012.
Il avait ajouté : « Ce n’est pas de gaieté de cœur, mais je l’annonce solennellement, j’ai décidé, après avoir beaucoup réfléchi de me pourvoir en Cassation. J’ai pris cette décision difficile parce que je suis une victime et un témoin…j’ai toujours œuvré pour permettre la réconciliation avec l’Alsace Moselle et l’Allemagne et je ne supporte pas l’idée de cette condamnation…Nous sommes le 12 janvier c’est un hasard si cette réunion se déroule ici, à cette date, mais, il y a 60 ans, jour pour jour, à la même heure, s’ouvrait le procès de Bordeaux qui a fait tellement de mal à la population de notre village. Pour la deuxième fois en 60 ans j’ai l’impression que les victimes sont une fois de plus ignorées ; c’est pour ça que j’ai pris cette décision. »

Oui en quelques mots avec cette franche simplicité qui le caractérisait, tout était dit.

Robert, survivant du massacre de 1944, témoin contraint par un temps de parole limité au procès de Bordeaux en 1953, se retrouvait en 2012 condamné, à la suite d’une erreur éditoriale, condamné pour avoir, en 1992, émis dans son ouvrage « Le drame heure par heure » un doute sur l’incorporation de force de soldats alsaciens présents à Oradour, le 10 juin, sous uniforme de la Waffen SS.
Cette condamnation avait interpelé, indigné de nombreux limousins et bien au-delà. Une pétition recueillit plus de 1800 signatures, un comité de soutien fut constitué puis l’association « Justice Pour Robert Hébras ».
En effet depuis de nombreuses années, nous connaissions Robert qui avait surmonté ses blessures par sa force, son travail disait-il, son courage, sa volonté de lutter contre l’oubli tout en refusant la haine. Il était désormais un Témoin, un Européen convaincu, porteur d’un message de paix et de réconciliation,
Sa mission suprême consistait à ne pas oublier les 643 victimes, inséparables de leurs lieux de vie, inséparables des ruines de son Village à préserver à tout prix. Maintenir la Mémoire des hommes et des lieux, inscrite désormais dans les travaux et recherches des Historiens, était une de ses priorités.
Le 16 octobre 2013 la Cour de Cassation cassa et annula sans renvoi l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Colmar. L’honneur, la dignité de Robert lui étaient rendus, l’objectif de l’association était atteint, elle pouvait se dissoudre.
Robert souhaita alors qu’elle continue à l’accompagner dans son travail de mémoire, et pour perpétuer son engagement, tout en défendant l’exactitude historique du drame du 10 juin 1944. Nous avons donc modifié les statuts, en devenant OHVR en 2014. Il accepta d’en être le Président d’Honneur.
C’est dans ce cadre que j’ai eu le privilège d’accompagner Robert dans les collèges, lycées, universités en France et en Allemagne (Munich, Frankfort, Schöndorf).
Durant des années je l’avais écouté, raconter aux élèves en parcourant les ruines « son après-midi » du 10 juin et celle de ses copains notamment Marcel Darthout, et insister auprès de ces jeunes sur la nécessité d’être toujours vigilants. Je l’avais entendu, dans l’église, répéter les paroles de Madame Rouffanche.
Après la projection du documentaire « Le droit à la Mémoire », dans lequel Robert répond aux questions du réalisateur, Mickael Faugeroux, ami et adhérent de OHVR, je le découvrais, dans une salle de classe ou un amphi comble en train de raconter, avec les mêmes mots, dans le silence total le 10 juin 1944. Il rappelait aux jeunes, combien il comptait sur eux, pour ne pas oublier.
Il rassurait les jeunes allemands : non ils n’étaient pas responsables. Il leur fallait maintenant construire l’unité des Peuples.
Il nous revient à tous de veiller à ce que le témoignage de Robert sur la transmission de son histoire, de l’histoire d’Oradour, le témoignage d’un humaniste, le témoignage d’un citoyen européen soit respecté.

Une vidéo de Robert témoignant en 2014 et 2018 est projetée.

Puis, Benoît Sadry précise les circonstances qui ont permis à la petite fille de l’un des Waffen SS âgé de 17 ans, Adolf HEINRICH, tireur dans la grange Laudy, de rencontrer Robert, en août 2022. (voir le texte de la prise de parole de Benoît lors de l’hommage du 17 février 2023 sur le site d’OHVR).
Cet homme qui a vécu, dans la solitude, avec sa culpabilité et ses remords, est à notre connaissance, le seul à avoir exprimé sa volonté de repentir. La rencontre dura 3 heures. Robert qui avait toujours attendu une telle démarche venue d’un des acteurs du massacre conclut « la boucle est bouclée ».
Et à la mort de Robert, dans son message, la petite fille écrivait « il m’a enseigné le pardon ».

La présidente avant de reprendre l’ordre du jour signale le décès de trois adhérents : Colette Truchassou, Raymond Constans et André Vareille.

Ordre du jour
1 Approbation du compte rendu de l’Assemblée Générale Ordinaire du 5 mars 2022 : adopté à l’unanimité.
2 Rapport d’activité :
Les activités 2022 comportent deux parties :
– la première, continuer l’accompagnement des débats à la suite de la projection du film « Mademoiselle Marie » organisée par l’ACJNA. Quatre projections ont eu lieu en 2022.
– la deuxième partie plus conséquente est la réalisation de la BD, projet suggéré par Robert en 2018.
Philippe Grandcoing rappelle la validation du contenu par le Comité de Lecture en décembre 2021. (Composition du comité présentée lors de l’Assemblée Générale du 5 mars 2022).
Les échanges réguliers entre le travail du dessinateur et le scénariste font que le projet avance bien et Robert a eu la satisfaction de voir et d‘apprécier les premières planches. Quelques-unes d’entre elles sont projetées sur écran à l’assemblée. L’album en comportera 72 qui seront accompagnées par des pages de contextualisation. La publication est prévue pour avril/mai 2024. Il est envisagé une exposition, présentant le travail de conception et de réalisation, à la BFM, dans le cadre de « Lire à Limoges ». Ce projet n’est pas encore finalisé.

Vote du rapport d’activité : voté à l’unanimité

3 Présentation du rapport financier par Philippe Pommier, trésorier :
Les Recettes sont de 1170,00 €,
Les Dépenses sont de 955,39 €
Le solde de l’exercice est bénéficiaire de 394,85 €

4 Compte rendu des Vérificateurs aux comptes :
Jean-Luc Bayard lit le rapport établi par Gérard Chambord et lui-même, vérificateurs aux Comptes.

« Mesdames, Messieurs,

Conformément à la mission qui nous est confiée, nous avons vérifié les comptes de l’association ORADOUR. Histoire, Vigilance et Réconciliation pour la période du 01.01.2022 au 31.12.2022.
Tous les documents comptables nécessaires à notre examen ont été mis à notre disposition. Nous avons pu ainsi effectuer les contrôles et vérifications nécessaires. Des explications pertinentes et des justificatifs adéquats ont été fournis dans chaque cas.
Dès lors, nous sommes en mesure d’attester que les comptes de l’association ORADOUR. Histoire, Vigilance et Réconciliation pour la période du 01.01.2022 au 31.12.2022 sont sincères et corrects. Ils se soldent par des recettes à hauteur de 1 170 € auxquelles il convient d’ajouter 180,24 € correspondant aux intérêts sur le livret et les dépenses à hauteur de 955,39 €, soit un résultat de 394,85 €.
En conséquence, nous vous proposons d’approuver ces comptes tels qu’ils vous sont présentés.
En foi de quoi, nous avons rédigé le présent rapport.
À Limoges, le 01.03.2023 »

           Jean-Luc BAYARD                                           Gérard CHAMBORD

Le compte rendu financier 2022 est adopté à l’unanimité

5 Le montant de la cotisation annuelle reste inchangé.

6 Renouvellement des membres du Conseil d’Administration et du Vérificateur aux comptes :
Les administrateurs Philippe Grandcoing, Bernadette Malinvaud, Philippe Pommier sortants renouvellent leur candidature : ils sont réélus à l’unanimité ainsi que le Vérificateur aux comptes Jean-Luc Bayard.

La parole est donnée à Agathe Hébras qui remercie l’association pour les 10 ans de soutien apporté à son grand-père. Elle ajoute que toutes les forces seront nécessaires concernant l’avenir.

7 Questions diverses :
Avenir de l’association ? Elle doit mener la BD à son terme.
L’assemblée rejette l’idée d’une dissolution. Une question légitime cependant car l’association fut créée dans un but bien précis. Un temps de réflexion s’impose.
Le Maire d’Oradour Philippe Lacroix rappelle qu’il souhaite que l’association puisse perdurer pour toutes les raisons contenues dans son libellé même : « Histoire Vigilance et Réconciliation ».
Un adhérent demande à ce que l’association fasse la démarche pour l’obtention de reconnaissance d’utilité publique. La présidente précise que c’est déjà le cas.

À 11h30 l’ordre du jour étant épuisé, la présidente clôt l’assemblée générale et invite tous les participants qui le désirent à aller se recueillir devant la tombe de Rober

                  La secrétaire de séance                           La présidente

                  Sandra Combeau                               Bernadette Malinvaud

 

Extraits de textes d’hommages transmis par deux adhérents n’ayant pu être présents à l’Assemblée désirant porter à la connaissance de tous leurs réflexions et leurs ressentis à l’annonce du décès de Robert.</>

« Ma famille habitait à Oradour. Je ressentais le besoin d’en comprendre l’histoire, évoquée par bribes par mon grand-père.
Lycéenne, la réalisation d’une vidéo m’a permis de rencontrer Robert, de l’interviewer et de visiter le village avec lui.
Ce fut très solennel, respectueux aussi : nous savions l’importance de ce moment. J’ai ressenti un profond respect pour Robert, tant par son vécu que la personne profondément humble, droite, humaine…
Robert a visionné « Garde en Mémoire » et en a été très touché. Il m’a remercié. C’était pourtant moi qui lui étais reconnaissante pour m’avoir accordé sa confiance et sa disponibilité.
Depuis ce temps-là nous avons gardé le contact.
Mon père est décédé. Robert à travers des mots simples ou des silences, était présent, un réconfort pour moi.
Merci Robert d’avoir croisé ton chemin et de nous être trouvés au-delà des mots et des maux, dans nos silences et nos regards. Je pleure un être d’exception qui a vécu l’indicible et qui pourtant a réussi à transmettre son vécu aux jeunes : français, allemands, à tous ceux qui ont souhaité tisser des liens de transmissions de l’Histoire et de ton histoire.
Plus que jamais nous devons continuer à veiller à ce que la vérité historique d’Oradour soit respectée. Que les témoignages de Robert et d’Oradour soient écoutés. Que les écrits et autres projets d’Oradour soient en accord avec la justesse du regard de Robert.
Que l’histoire d’Oradour soit « gardée en Mémoire » avec celle de Robert.

Aurélia CLAVAUD »

« Ma première rencontre avec Robert Hébras eut lieu en mai 2010, lors de mes recherches en Master. Mes questions d’apprenti historien très maladroites, pas à la hauteur de l’incompréhensible, de l’inimaginable vécu par le témoin, reçurent des réponses courtes, précises, mesurées. Économie des mots. Des mots justes, reflets de l’exactitude historique. Plus tard j’écrivis à Robert pour lui demander d’excuser mon insuffisance et lui exprimer mon admiration pour son courage et sa dignité, sa force.
Ensuite j’ai rencontré Robert plusieurs fois, lors de mes déplacements en Limousin, dans le cadre de l’association. Ces rencontres m’ont laissé le souvenir d’un homme d’une modestie remarquable, malgré ses rencontres avec des présidents ou des personnages importants. Un homme sans prétention, qui s’investit dans la réconciliation franco-allemande depuis les années 80, mais qui vit aussi les parallèles entre les survivants d’Oradour et ceux du Bataclan par exemple ou avec Nora Cortiñas, l’une des mères de la Place de mai à Buenos Aires, et qui s’intéressa aux démarches de jeunes chercheurs, comme Héloïse Belloir ou Andrea Erkenbrecher.
Ce que l’histoire de Robert Hébras nous montre, c’est le fait qu’on peut témoigner lorsqu’il y a un devoir à le faire, qu’il est possible de parler aux futures générations, qu’il est possible de ne pas céder à la haine et l’amertume.
L’Histoire est une affaire sombre parfois, …. L’Histoire comme une discipline, c’est le dialogue entre le présent et le passé, ne pas oublier…
À la fin de Hamlet de William Shakespeare, le personnage de Horatio formule le vœu « May flights of angels sing thee to thy rest » (‘Que des essaims d’anges te bercent de leurs chants vers le repos éternel’) J’espère, qu’on soit croyant ou pas, que le repos éternel accordera à Robert, la paix et la sérénité qu’il n’a pas pu connaître dans la vie.

Mason NORTON, Docteur en Histoire contemporaine

Royaume-Uni, février 2023 »

Témoignages de Robert Hébras en 2014 et 2018

Nous proposons un montage vidéo (15 minutes), notamment à l’intention des Collégiens et Lycéens.

NB : Le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Limoges le 15 janvier 2020 officialise le nom d’une 643ème victime qui n’était pas comptabilisée à cause d’une confusion d’état civil.

 

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