DEVOIR DE MEMOIRE

ORADOUR. Histoire, Vigilance et Réconciliation

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Hommage à Robert Hébras par Hans-Dieter Lucas Ambassadeur d’Allemagne en France

Oradour-sur-Glane, le 17 février 2023

Monsieur le Ministre,
Madame la Ministre,
Monsieur le Président,
Madame la Préfète,
Messieurs les Présidents,
Monsieur le Vice-Président,
Messieurs les Maires,
Mesdames et Messieurs les Élu(e)s,
Monsieur le Président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs,
Chère famille Hébras,
Mesdames et Messieurs,

Nous nous sommes réunis ici aujourd’hui pour dire adieu à Robert Hébras.
Monsieur Hébras fut le dernier survivant du massacre d’Oradour-sur-Glane commis par la SS, mais surtout un homme tout à fait remarquable par son courage et son impressionnant engagement au service de la mémoire et la réconciliation.
Avec lui disparaît également un grand acteur des relations franco-allemandes, auquel l’Allemagne doit beaucoup.
Mesdames et Messieurs, je tenais beaucoup à être parmi vous aujourd’hui pour rendre hommage, au nom de la République fédérale d’Allemagne, à cette personnalité exceptionnelle, un hommage commun où Français et Allemands se tiennent côte à côte.
C’est un moment particulièrement émouvant pour moi, comme pour tous mes compatriotes présents aujourd’hui à Oradour-sur-Glane.
À mon grand regret, je n’ai pas connu personnellement Monsieur Hébras mais je garde un souvenir ému de cette photo si poignante et symbolique, prise en 2013 à Oradour, sur laquelle il apparaît aux côtés des présidents Hollande et Gauck, tous trois main dans la main. Elle témoigne d’un moment historique, d’une étape charnière dans les relations franco-allemandes.
Le fait qu’un travail mémoriel franco-allemand soit possible aujourd’hui à Oradour, après les atrocités commises par l’Allemagne nazie, était tout sauf une évidence. Monsieur Hébras a joué un rôle décisif à cet égard. Comme l’ancien président fédéral allemand, Joachim Gauck, l’a exprimé dans sa lettre de condoléances : « La capacité de Robert Hébras à surpasser ses indicibles souffrances et à nous tendre la main, à nous, Allemands, dans un geste de réconciliation, lui a valu un infini respect. »
Car le nom d’Oradour-sur-Glane restera à jamais associé à l’un des pires crimes perpétrés en France par des Allemands sous le nazisme.
Le 10 juin 1944, la Waffen-SS a commis à Oradour un crime inconcevable : elle a tué de manière bestiale 643 hommes, femmes et enfants, c’est-à-dire la quasi-totalité des habitants, et anéanti le village.
Cet abominable massacre perpétré par des Allemands ne cesse de nous emplir de honte. À cette honte s’en ajoute une autre : celle qu’aucun des auteurs du massacre n’ait été condamné en République fédérale d’Allemagne.
Je voudrais remercier les proches des victimes, de l’Association des Familles des Martyrs, présents aujourd’hui, qui se sont ouverts avec Monsieur Hébras à une commémoration commune avec l’Allemagne. Nous sommes reconnaissants du chemin difficile et douloureux qu’ils et elles ont dû parcourir.
Les habitants d’Oradour n’ont pas seulement œuvré pour garder vivant le souvenir de cette tragédie, mais ont aussi veillé à inclure les Allemands dans ce travail de mémoire et ainsi permis la réconciliation – et cette réconciliation reste, après toutes ces horreurs, un miracle.
Que cela passe aujourd’hui souvent par un travail accompli par des jeunes venus des deux côtés du Rhin est merveilleux.
Monsieur Hébras contribuait énormément à ce travail de mémoire, avec des amis allemands comme Fritz Körber.
Avec Robert Hébras, le dernier témoin du drame d’Oradour nous a quittés, mais pas le souvenir ni la responsabilité.

Nous, Allemands, nous inclinons devant les indicibles souffrances que Robert Hébras et toutes les victimes du massacre d’Oradour ont subies. Et nous saluons la grandeur d’âme dont Robert Hébras et les familles des victimes ont fait preuve en souhaitant la réconciliation.

Nous n’oublierons jamais Robert Hébras ni son action au service de l’amitié entre nos deux peuples et de la paix en Europe.

Merci.

Hommage à Robert Hébras par son ami allemand Fritz Körber

« Les personnes entrent dans notre vie et nous accompagnent pendant un certain temps.
Quelques une d´entre elles restent pour toujours, car elles laissent des traces dans nos cœurs. »

Chère famille Hébras,
Mesdames et Messieurs,

Lorsque des peuples surmontent les clivages du passé et apprennent à vivre ensemble dans un esprit de bon voisinage et d’amitié, c’est toujours l’œuvre de quelques personnalités courageuses et tournées vers l’avenir.

Les habitants de Moyenne-Franconie honorent aujourd’hui avec beaucoup de tristesse la mémoire d’un homme qui est devenu une institution pour l’amitié franco-allemande. A côté de la douleur du départ, il y a la gratitude d´avoir connu Robert Hébras. Sans vouloir préjuger de ce que les historiens ou les biographes diront un jour de l’œuvre de mon ami Robert, je ressens le devoir de lui rendre hommage, notamment en raison de mon expérience personnelle.

Robert était déjà pour moi une grande personnalité lorsque je l’ai rencontré il y a 38 ans, dans une des salles de la Meistersingerhalle à Nuremberg où il s´exprimait. Et je saisis l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour lui rendre hommage tout particulièrement pour le discours mémorable qu´il a tenu ce jour-là et son engagement inlassable en faveur de l’amitié franco-allemande et de l’entente entre les peuples.
Le 10 juin 1944, Robert a été témoin de ce qui peut arriver lorsque des hommes font fi de tous les préceptes et fondements éthiques. Son engagement en faveur de la paix et sa capacité de se tourner vers la réconciliation s’enracinent chez lui dans du terrible drame vécu.
Les paroles émouvantes de réconciliation et d’entente qu’il a adressées à nos deux peuples, en présence de Willy Brandt, en ce jour inoubliable du 8 mai 1985, ont rapproché tous les auditeurs, les Allemands et les Français, et ouvert un nouveau chapitre pour nos États et nos peuples.

Robert était un patriote passionné. Il incarnait, comme peu de personnes, la substance et le style. Malgré les terribles événements d’Oradour-sur-Glane, il s’est toujours battu pour la paix et l’entente entre les peuples : avec courage, toujours dans un esprit de conciliation et de réconciliation. Il a toujours eu un sens clair de la direction à suivre et s’est appuyé sur son pouvoir d’exhorter et d’orienter avec le mot juste. Sa personnalité et ses multiples engagements se reflètent également dans l’éventail des nombreux honneurs et distinctions qu´il a reçus.

Son savoir-faire, sa modestie et sa cordialité lui ont donné une dimension humaine impressionnante, qui restera à jamais inoubliable. Sa voix était inimitable, elle nous touchait souvent au plus profond de notre être. Robert restera à jamais dans ma mémoire et dans celle de beaucoup de personnes en Moyenne-Franconie : une personnalité à l’autorité marquée, d’une grande fraîcheur intellectuelle, convaincant dans son approche humaine, chaleureux et tourné vers l’amitié. Nous nous souviendrons de lui avec une profonde gratitude. Cher ami Robert, tu vas me manquer.

Aujourd´hui la Moyenne-Franconie est en deuil.
Les personnes suivantes m´accompagnent :
Armin Kroder, Président du Bezirk de Moyenne-Franconie,
Maria Scherrers, Membre de l´Assemblée du Bezirk en charge des jumelages avec la Nouvelle-Aquitaine,
Sylvie Feja, responsable du jumelage Moyenne Franconie/Nouvelle Aquitaine,
Robert Ilg, Maire de la ville de Hersbruck,
Pour le spectacle de Mademoiselle Marie : Fritz Stiegler l´auteur et ses collègues Thomas Dröge et Matthias Schäfer,
Et Christian Jechnerer, professeur de français au lycée Albert Schweitzer à Erlangen et organisateur du Tour de la Paix Erlangen  / Oradour-sur-Glane.

 

Oradour-sur-Glane, le 17 février 2023
Fritz Körber
Ancien Maire de la ville de Schwaig
Ancien vice-président du Bezirk de Moyenne-Franconie

Hommage à Robert Hébras par Philippe Lacroix Maire d’Oradour-sur-Glane

Monsieur le Ministre de l’Éducation Nationale,
Monsieur le Président François Hollande,
Votre excellence Monsieur 1’Ambassadeur de la République Fédérale d’Allemagne,
Madame la Préfète de la Haute-Vienne,
Madame la Consule Générale d’Allemagne,
Monsieur le Président de 1’Association Nationale des Familles des Martyrs, cher Benoît Sadry,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Madame la Vice- Présidente de la Région Nouvelle-Aquitaine,
Monsieur le Président du Conseil Départemental de la Haute-Vienne,
Monsieur le Président du Centre de la Mémoire, Cher Fabrice Escure,
Madame la Présidente et les membres de 1’Association des Amis de Robert Hébras, Histoire, Vigilance, Réconciliation,
Monsieur le Maire Honoraire d’Oradour-Sur-Glane,
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités
Cher Richard, Chère Agathe, Chère Famille, Chers amis venus du Limousin, de France et de l’étranger,

Il avait rêvé d’être mécanicien dans le village où il était né le 29 juin 1925.
Il avait rêvé le midi après son travail de déjeuner dans la maison où il avait grandi auprès de sa maman et de sa famille.
Il avait rêvé le soir après la débauche de retrouver ses amis, Henri, Mimi, André, Marcel et tant d’autres au café du chêne pour partager un moment de convivialité autour d’un verre en refaisant le monde et en évoquant l’actualité du moment.
Il avait rêvé de ces dimanches paisibles à l’aube d’une journée lumineuse dans cette petite ville du limousin bercée par la Glane et le chant des oiseaux.
Il avait rêvé d’une vie simple et tranquille.

Hélas, des honnies en avaient décidé autrement.
Ce 10 juin 1944, la vie de Robert HEBRAS bascule comme celle des familles d’Oradour. L’arrivée de la division Das Reich, le rassemblement de la population, la séparation, un dernier regard de sa maman plein d’angoisse, puis Robert et ses camarades sont conduits dans la grange Laudy.
Dès lors, L’attente commence puis c’est le signal de la mitraille les plaintes, les gémissements, les soldats SS qui donnent les coups de grâce puis c’est l’embrasement.
Robert tente de sortir du brasier. Après de longs moments, il trouve refuge dans des étables jouxtant la grange.
Au bout de longues minutes, il y retrouve d’autres hommes Mathieu Borie, Yvon Roby, Clément Broussaudier, Marcel Darthout. Ils finissent les uns et les autres par s’extirper de cet enfer.
Pierre Poutaraud, le garagiste sera abattu dans sa fuite par une sentinelle

Aujourd’hui, nous pensons bien sûr et comme toujours à nos martyrs, aux familles, à celles et ceux, qui, toute leur vie, ont vécu dans le souvenir de cette journée d’épouvante.

Nous avons une pensée particulière pour Renée MANEUF, disparue en octobre dernier, Amélie LEBRAUD et Camille BARDET qui nous ont quitté il y a quelques jours.
Nous apportons toute notre affection à Camille SENON et André DESOURTEAUX, venus rendre hommage à leur ami.
Ce jour funeste du 10 juin 1944, Robert perd sa maman et ses deux sœurs, massacrées et brûlées dans l’église mais aussi ses nombreux amis.
Son village est entièrement incendié et détruit.
Le traumatisme est immense pour ce jeune garçon encore plein d’insouciance.
En cette période de conflit, il n’y avait pas de cellules psychologiques comme celles que l’on connaît de nos jours. Il ne fallait compter que sur soi-même pour lutter contre cette douleur indescriptible et dévastatrice et tenter de se reconstruire.

Puis ce fût, l’engagement dans la résistance avant que ne cesse cette guerre, puis la reconstruction d’Oradour et enfin ce garage qu’il allait exploiter pendant plusieurs années dans le nouveau village.

Dans le même temps, Robert fonda un foyer avec sa première épouse Yvonne : de cette union naitra son fils Richard.

Il exerça par la suite son activité professionnelle à Saint-Junien avant de prendre une retraite bien méritée auprès de Christiane dans sa maison de Perrier Bord.
C’est à partir de 1983, au moment du procès d’Heinz Barth à Berlin Est, que Robert va consacrer le restant de sa vie à la transmission de la mémoire. Il fait la rencontre d’un allemand qui deviendra son grand ami « Fritz KORBER ». Ce dernier le présentera au chancelier Willy BRANDT.
Robert HEBRAS va s’engager pleinement dans la transmission de la mémoire aidé en cela par ses puissantes convictions européennes. Il recevra de très nombreux groupes et délégations avec un attachement particulier aux plus jeunes auxquels il racontera son histoire tragique.

Il va s’évertuer ainsi à participer activement à la réconciliation avec 1’Allemagne nouant des liens solides Outre Rhin.

Son action aura indiscutablement permis d’aboutir à cette journée du 4 septembre 2013 avec la venue des deux Présidents allemand et français Joachim GAUCK et François HOLLANDE. Cette journée de réconciliation fût un grand moment chargé d’émotion et cette photo de Robert et des deux présidents dans l’église détruite figure à jamais dans notre histoire collective.

En 20!7, il accompagnait dans un moment intime le Président Emmanuel MACRON et des jeunes venus des 4 coins de France en leur expliquant inlassablement l’histoire de cette journée tragique du 1 0 juin où 643 martyrs avaient perdu la vie en apportant à nouveau son témoignage pour qu’ils deviennent à leur tour des passeurs de mémoire.

Au cours de cette même année 2017, nous recevions la troupe allemande de Cadolzburg pour une représentation unique de la comédie musicale « Mademoiselle Marie » ici dans notre ville. Je me souviens combien Robert était ému et heureux de cette évolution positive et de cette amitié qui se concrétisait.

L’engagement de Robert HEBRAS, ses actions en sa qualité de « témoin » du massacre du 10 juin, notamment auprès des plus jeunes, sa volonté perpétuelle d’être un « faiseur » de paix, ont été reconnus par la France mais aussi au-delà des frontières.

Robert HEBRAS recevra l’hommage de la Nation au travers de nombreuses distinctions : il était Officier de la Légion d’Honneur, Commandeur de l’Ordre des Palmes Académiques, Commandeur de l’Ordre National du Mérite, décoration remise en janvier 2022 par le Président de la République.

L’Allemagne a, quant à elle, élevé Robert HEBRAS au titre de Croix d’Officier de l’Ordre du Mérite Allemand, ce qui démontre combien sa détermination en qualité de facilitateur de paix était reconnue au-delà des frontières nationales.

Celui qui a œuvré et passé sa vie à la réconciliation des peuples a été distingué par le Parlement Européen en 2017 : la conscience citoyenne de cet Européen convaincu a ainsi été saluée.

Les dernières années de sa vie, Robert avait décidé de passer le témoin à Agathe sa petite fille pour que la transmission de son message puisse perdurer.

Il savait également qu’il pouvait compter sur nous pour ne pas oublier et pour porter ce message de paix, de fraternité et d’espoir.

Sa voix, cette voix si particulière, vient de s’éteindre mais elle continuera de raisonner dans notre esprit et dans nos cœurs

Son regard portait en lui cette lumière de l’espérance, celle d’un monde de tolérance et d’humanisme.

Il est de notre devoir à tous ici réunis de porter ensemble l’héritage que Robert HEBRAS nous laisse.
Il nous revient de poursuivre ensemble ce travail de mémoire et de défendre les belles valeurs qu’il portait.

Un grand monsieur vient de disparaitre.
Il était un homme d’exception qui mérite notre respect et notre affection. Il était pour certain un ami, un frère, pour d’autres une connaissance, il était le dernier témoin.
Il était Robert HEBRAS.
Toutes et tous aujourd’hui, nous lui témoignons de notre très grande considération.

Denis DIDEROT écrivait :
« La mémoire, c ‘est cette propriété qu’a le vivant de transcender le temps. Elle assure à la fois la survivance du passé et la persistance du présent dans l ‘avenir ».

Robert HEBRAS était cette mémoire.
Nous poursuivons à notre tour, dès aujourd’hui, la mission qui était sienne, pour ne jamais oublier …et pour que perdure cette transmission au-delà des ans, au-delà des temps. Pour que l’histoire de Robert HEBRAS perdure dans la grande Histoire, et pour pouvoir reprendre les mots qu’il a écrit des dizaines, des centaines, des milliers de foi « Oradour, souviens toi… ».

À Richard, à Agathe, à la famille de Robert Hébras et à ses amis, j’adresse en mon nom personnel, au nom du Conseil municipal et du personnel communal mais aussi au nom des Radounaudes et des Radounauds, nos très sincères condoléances et les assure de notre soutien et de notre profonde affection.

 

Philippe LACROIX

Hommage à Robert Hébras par Benoît Sadry président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs d’Oradour-sur-Glane

Benoît Sadry, président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs et adhérent d’OHVR depuis 2012, nous autorise à publier le texte de son allocution lors de la cérémonie du 17 Février 2023 en Hommage à Robert Hébras.

Monsieur le Ministre,
Madame la Secrétaire d’État,
Votre Excellence Monsieur l’Ambassadeur de la République Fédérale d’Allemagne,
Madame la Consule d’Allemagne,
Monsieur le Président Hollande,
Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,
Madame la Vice-Présidente du Conseil Régional de Nouvelle-Aquitaine,
Monsieur le Président du Conseil Départemental,
Monsieur le Maire d’Oradour-Sur-Glane,
Mesdames et Messieurs les Élus,
Mesdames, Messieurs,

Tous ceux qui ont connu Robert Hébras conserveront de lui cette image de passeur de mémoire, celle d’un européen épris de liberté et de fraternité, celle d’un homme de paix et de réconciliation entre les peuples.
Pour nous, Robert, était avant tout l’incarnation de la gentillesse et de la simplicité, un homme au regard pétillant et au sourire malicieux, un homme rempli d’humilité.

Jamais il ne s’est considéré comme un héros, tout au plus s’est-il résolu – avec le temps – à accepter la qualité de témoin de l’histoire, car, pour lui, le témoin sacré de la tragédie qui s’est déroulée ici, était Marguerite Rouffanche, l’unique femme à avoir échappé à l’enfer de l’église, l’ultime voix des 450 femmes et enfants d’Oradour.

S’il a reçu des hommages pour son œuvre de mémoire – auprès de la jeunesse notamment -il a toujours prétendu et affirmé qu’il les recevait pour les victimes et qu’il les leur dédiait.

L’humilité de Robert me revient à l’esprit quand je me remémore cette journée du 25 janvier 2022, et plus particulièrement le moment immédiat après que le Président de la République ait quitté Oradour.
Robert venait de recevoir la cravate de Commandeur de l’Ordre National du Mérite. Voici ses mots :
« Tu te rends compte, le Président de la République est venu juste pour moi, j’ai peine à y croire ».
En effet, quand j’y repense, je mesure l’importance que cela pouvait revêtir pour un homme de sa génération. Lui qui était né ici, le 29 juin 1925, à une époque où les moyens de communication n’étaient pas ceux que l’on connaît aujourd’hui, à une époque où un jeune limousin avait peu de chance de rencontrer en personne le Président de la République au cours de son existence.

Comment aurait-il pu imaginer quand il était encore enfant, quand il jouait aux billes sur les bords des trottoirs des rues que nous venons de parcourir, avec ses copains André Désourteaux et Henri Bouchoule, qu’un jour le Président de la République ferait spécialement ce déplacement pour lui ?
En fait, ce qu’il avait du mal à réaliser c’est la raison d’un tel honneur. Pour lui, témoigner auprès des visiteurs, anonymes ou officiels, allait de soi, il n’y avait pas d’honneur particulier à en attendre ; ce n’était même pas un devoir, c’était tout simplement une évidence.

Comment aurait-il pu imaginer, le 10 juin 1944 aux alentours de 13h30, alors qu’il discutait encore tranquillement sur le pas de sa porte avec son copain Mimi, que quelques heures plus tard il serait pour le reste de sa vie la mémoire vivante des 643 habitants du village de son enfance massacrés par les balles de l’ennemi ?

Comment aurait-il pu penser, après cette tragique journée, confronté à la souffrance incommensurable de la perte de sa mère, Marie, et de ses deux sœurs, Denise et Georgette, lui, le modeste apprenti mécanicien de 19 ans, empli de haine et de soif de vengeance envers le boche assassin, que quelques décennies plus tard il serait l’une des voix les plus sincères pour défendre et soutenir l’amitié franco-allemande ?

Robert Hébras n’a pourtant pas été immédiatement le témoin que nous avons connu. Il lui a fallu du temps et de l’abnégation pour apprendre à dépasser ses souffrances et à surmonter son deuil.
Pour sortir de son silence, il a dû accepter également l’idée qu’il n’y aurait pas de justice pour les martyrs d’Oradour.

En effet, Robert nous quitte en ce mois de février 2023, mois au cours duquel, il y a précisément 70 ans se terminait devant la justice militaire, à Bordeaux, le procès dit d’Oradour.

Un procès qui a divisé notre pays pendant plusieurs semaines puisque – comble du malheur pour la France de l’après-guerre – 13 des 21 accusés étaient des Alsaciens. Du 12 janvier au 13 février 1953, deux mémoires s’y sont confrontées, deux crimes de guerre subis par des Français s’y sont opposés – le massacre d’Oradour-sur-Glane d’un côté et, de l’autre, le drame de l’incorporation de force vécu par l’Alsace.

N’ayant pu se porter partie civile, Robert est convoqué le 22 janvier 1953 pour faire une déposition devant les juges militaires. Le président lui demande d’aller à l’essentiel et de raconter brièvement ce dont il a été le témoin, mais Robert attendait tout autre chose. Il aurait souhaité qu’on prenne le temps de l’écouter, qu’on entende ses souffrances ; que les accusés répondent à ses questions, la réponse à certaines d’entre elles aurait peut-être pu mettre un terme à quelques-uns de ses pires cauchemars.

Mais il n’en eut pas le droit.

Pire encore, il doit prendre acte et se résoudre à concéder, en plein procès, que le législateur modifie rétroactivement la loi, il lui faut accepter ensuite un verdict jugé trop clément à Oradour, et, enfin – alors que l’encre du jugement n’est pas encore totalement sèche – que le Parlement français vote une loi d’amnistie au nom de l’unité nationale. A cette époque, pour les survivants comme Robert, pour les familles, cette loi est considérée comme une trahison de l’État. Pour eux, en plus d’être le plus grand massacre de civils en France pendant la Seconde Guerre Mondiale, Oradour sera désormais le symbole du crime impuni.

Malgré tout, les blessures vont cicatriser à mesure que le temps passe. En 1983, alors qu’il est récemment devenu président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs d’Oradour, il est appelé, avec quelques autres survivants, à témoigner au procès d’un sous-lieutenant dont la participation au massacre est avérée, et qu’un tribunal de Berlin-Est s’est enfin décidé à juger.

Là encore, Robert en revient déçu. L’ancien S.S. n’a pas répondu à ses questions. Ce dernier, en apprenant qu’il y avait des survivants, a même estimé que son travail à l’époque avait été mal fait.

Malgré les déceptions, ce moment marque pourtant un tournant décisif dans la vie de Robert Hébras.

Au cours du procès, des journalistes allemands vont reprendre son témoignage dans la presse et, quelques mois plus tard, il est invité par l’ex-Chancelier Willy Brandt à prendre la parole à la Conférence Internationale sur la Paix. C’est là qu’il va commencer à tisser des liens indéfectibles d’amitié avec un allemand et que sa perception de l’Allemagne et des allemands va radicalement changer.

Cher Fritz Körber, merci d’avoir fait le déplacement pour saluer aujourd’hui la mémoire de votre ami. Il y a dans la vie des rencontres qui changent les destinées. Votre rencontre avec Robert, il y a bientôt 40 ans, a bouleversé sa vie. Votre présence aujourd’hui, en ce moment si particulier, donne tout son sens à l’amitié franco-allemande si chère à Robert.

C’est en effet à ce moment-là que Robert prend conscience que les cendres d’Oradour, comme celles des martyrs des camps de concentration, des victimes des bombardements ou des résistants suppliciés jusqu’à l’ultime agonie, sont en fait le véritable ciment de l’Union Européenne.
En plus d’expliquer la tragédie et de transmettre le souvenir des victimes, il comprend qu’il faudra dorénavant montrer et expliquer aux nouvelles générations que des hommes courageux et visionnaires ont signé, dès 1957, le premier Traité d’Union Européenne, pour éviter que de nouveaux Oradours se reproduisent.

Dès ce moment, Robert va se consacrer à bâtir des ponts entre les hommes en apportant son soutien à tous les projets aptes à développer ce nouvel idéal européen fondé sur la liberté, la dignité de l’Homme, la justice et la solidarité. Il reprend ainsi à son compte, un souhait magnifiquement formulé par Roman Kent, un survivant du camp d’Auschwitz-Birkenau, qui disait : « Nous ne voulons pas, non, nous ne voulons pas que notre passé soit l’avenir de nos enfants ! »

Dans le même temps, Robert voit le village martyr se dégrader au fil des saisons, et sensibilise toutes les personnalités politiques qui vont venir en visite, sur le fait que c’est en veillant à l’entretien des pierres dans leur totalité, que la jeunesse européenne de demain pourra comprendre ce que fut ce massacre de masse en plein cœur de la France.

Évidemment, l’ouverture d’esprit de Robert vis-à-vis de l’Allemagne a pu être difficile à accepter par certains de ses amis ici qui avaient souffert, comme lui, dans leur chair comme dans leur cœur, de cette tragédie.

Robert avait un temps d’avance, c’était un visionnaire et un analyste avisé. L’avenir lui a donné raison. Au final, tous ont fini par se rallier à lui pour défendre cet idéal européen – humaniste et démocratique – consistant à nouer des coopérations entre les peuples afin d’éviter d’avoir à revivre les souffrances du passé. Tous ont compris que cette philosophie était véritablement le meilleur hommage qui puisse être rendu à ceux qui étaient tombés en martyrs ce 10 juin 1944.

C’est vraiment dans cet esprit, avec votre concours et en votre présence Monsieur le Président Hollande, que Robert accompagne, le 4 septembre 2013, à travers les ruines d’Oradour, le Président de la République Fédérale d’Allemagne, Joachim Gauck, venu officiellement reconnaître le crime de guerre perpétré ici par « une unité sous commandement allemand ».

Pour lui qui avait su depuis longtemps tisser des liens avec le peuple allemand, cette visite rend possible désormais, pour les familles des victimes et les autres survivants du massacre, un nouveau chemin vers l’avenir, « un avenir commun, un avenir pacifique, dans le partenariat entre la France et l’Allemagne ».

Après cette journée qui aurait pu être l’aboutissement de son engagement au service de la mémoire, Robert va continuer de soutenir plusieurs projets franco-allemands, ici-même ou en se déplaçant encore à plusieurs reprises sur le sol allemand.

Je pense avoir eu la chance de partager avec lui, le 3 août dernier, l’ultime étape de son chemin vers la réconciliation, celui où, victimes et auteurs de la tragédie, pleurent ensemble les morts.

Ce jour-là, grâce à notre amie, l’historienne allemande Andrea Erkenbrecher, il va rencontrer la petite-fille de l’un des deux soldats qui, le 10 juin 1944, avaient tiré sur le groupe d’hommes de la grange Laudy et dont les balles l’avaient touché personnellement. Les premières minutes de cette rencontre n’ont été faciles ni pour elle, ni pour lui, tellement la dimension émotionnelle et symbolique de ce rendez-vous avait de sens pour l’un et l’autre.

En s’écoutant mutuellement, chacun a pu prendre conscience qu’aucun n’était ressorti indemne de cet évènement, ni la victime, ni celui qui était de l’autre côté du fusil. La jeune femme a ainsi expliqué que son grand-père n’avait que 17 ans à l’époque et qu’il avait été intégré à la Division S.S. Das Reich qu’en mars 1944, Oradour était en quelque sorte son « baptême du feu ».

Après le procès de Bordeaux en 1953, prenant conscience que sa participation dans ce massacre hanterait toute sa vie, il s’est livré à la justice de son pays. A l’époque, il a raconté toute son implication dans la tragédie, sans chercher aucunement à se disculper. Ses dépositions retrouvées ont montré qu’il avait avoué avoir d’abord tiré sur un groupe d’hommes (celui dans lequel se trouvait Robert) puis, plus tard dans l’après-midi, avoir participé activement à l’exécution des femmes et des enfants dans l’église. Malgré les dépositions, qu’il fera par deux fois en 1953 puis en 1956, les magistrats instructeurs ont manifesté peu d’intérêt pour son affaire, et l’ont classée sans suite.  Au final, il portera toute sa vie et d’une certaine manière dans la souffrance, avec le poids de la solitude et du silence, le fait d’avoir du sang sur les mains.

La rencontre avec sa petite-fille, que tous pensaient brève, va durer finalement près de trois heures. L’échange sera passionnant et empreint d’humanité.

Au moment de partir, elle s’est approchée de Robert pour le saluer et instinctivement il l’a prise dans ses bras. Alors qu’il s’apprête à lui dire au revoir, il lui confie : « Vous savez il y a eu dans ma vie des jours importants, mais aujourd’hui c’est comme si c’était votre grand-père qui était venu me voir. La boucle est bouclée. Merci ».

Ces paroles étaient bouleversantes, elles résonnaient comme la satisfaction de quelque chose d’attendu depuis longtemps et d’enfin réalisé, la preuve attendue et tant espérée d’une repentance sincère de l’un des bourreaux.

Pour la jeune femme, cette rencontre lui aura permis de finaliser la démarche engagée par son grand-père consistant à reconnaître son implication dans la tragédie.

Samedi dernier, dès qu’elle a appris la nouvelle de la disparition de Robert, elle a été l’une des premières à m’adresser un message. Je vais vous en donner lecture car il résume à lui seul l’homme qu’était Robert et dont nous devons nous souvenir :
« Même si je n’ai eu l’honneur de le rencontrer qu’une seule fois, j’ai l’impression d’avoir perdu quelqu’un avec qui mon histoire est profondément liée.
Je me souviens avoir eu peur quand nous nous sommes rencontrés. Peur d’être jugée pour quelque chose que je n’avais pas fait. Mais l’une des premières phrases qu’il m’a adressées a été : « ce n’est pas votre faute ».
Quel grand personnage il était ! Surtout dans le contexte de ce qu’il a vécu à travers mon grand-père. J’aurais pu m’attendre à ce qu’il soit simplement poli, je ne m’attendais franchement pas à ces paroles au début de notre entretien. Pour moi, il est, et, était la paix en personne. Il m’a enseigné le pardon.
Je dis au revoir à un grand homme et je suis remplie d’espoir à l’idée qu’il parte en paix ».

Artisan de paix, acteur de la réconciliation avec l’Allemagne, ardent défenseur de l’Europe, le jeune enfant né à Oradour en 1925 est, et doit rester inexorablement, un exemple à suivre, une mémoire à faire vivre, un travail à poursuivre.

Dans nos sociétés où la violence semble gagner chaque jour un peu plus, où le développement de l’individualisme favorise la montée de la xénophobie et du racisme ; dans ce monde qui nous offre à nouveau – aux portes de l’Europe – le spectacle de combats que nous croyions ceux d’un autre temps, d’images de ruines fumantes et de rues jonchées de cadavres qui nous ramènent avec brutalité à ce à quoi ressemblait Oradour au lendemain du massacre en 1944 ; Robert Hébras nous laisse en héritage le devoir qu’il avait fait sien, celui de promouvoir – mais aussi d’en être les gardiens – des valeurs humanistes, démocratiques et de solidarité de ceux qui ont imaginé l’Europe d’après-guerre et dont nous bénéficions aujourd’hui encore.

Il s’agit là de notre devoir envers ceux qui sont tombés, il y a bientôt 80 ans, de notre devoir aujourd’hui envers Robert, car, comme l’a si bien écrit notre ami le Président de la Fondation du Camp des Milles, Alain Chouraqui :  « nous, nous savons maintenant que  les nations les plus « civilisées » peuvent aussi produire des monstres et des monstruosités. Nous savons jusqu’où et surtout comment la barbarie humaine peut tout emporter, jusqu’à l’humanité même de l’homme ».
A nous d’être vigilants !

Le devoir de mémoire qui animait Robert – et qui nous rassemble une dernière fois autour de lui aujourd’hui – doit permettre à nos compatriotes de saisir les signes du passé dans notre présent, afin de pouvoir construire ensemble l’avenir pour lesquels certains – en d’autres temps – n’ont pas hésité à sacrifier leur vie.

Robert, nous avons eu la chance d’avoir avec toi ce contact unique, irremplaçable, de celui qui pouvait dire « j’y étais, j’ai vu ».

Nous devons mesurer la chance, le privilège que nous avons eu de vivre aux côtés d’un tel témoin de notre Histoire.

Robert, pour éviter la négation de l’homme qu’engendre les dictatures et d’autres déchainements de violences tels que ceux que tu avais vécu ici, tu avais un rêve… un rêve de fraternité universelle… il nous appartient aujourd’hui de le faire vivre.

Tu nous as tracé un chemin, nous suivrons cette route pour que jamais l’histoire d’Oradour ne s’éteigne. Nous serons les garants de ta mémoire, de ton histoire et de l’Histoire d’Oradour.

Nous ferons nôtre le « Oradour – souviens toi » qui était tien….

Je terminerai en reprenant les termes de Victor Hugo « Et de l’Union des Libertés dans la fraternité des peuples, naîtra la sympathie des âmes, germe de cet immense avenir où commencera par le genre humain la vie universelle et qu’on appellera la Paix de l’Europe ».

 

Benoît SADRY

Allocution du Président de l’ANFMOG le 10 juin 2022

Le 10 juin 2022 le Ministre de la Justice Éric Dupont-Moretti, assistait à la commémoration du massacre d’Oradour-sur-Glane.
Benoît Sadry, président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs et adhérent de l’association OHVR depuis 2012, nous autorise à publier le texte de son allocution.

Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les représentants des délégations françaises et étrangères,
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités,

Monsieur le Garde des Sceaux, au nom de l’Association Nationale des Familles des Martyrs d’Oradour-sur-Glane, qu’il m’est donné de représenter depuis quelques mois, je tiens à vous exprimer notre reconnaissance pour avoir accepté de présider cette journée anniversaire.
Au cours de cet hommage aux victimes du massacre du 10 Juin 1944, vous pourrez vous rendre compte que le crime de guerre – qui a été méthodiquement exécuté ici il y a 78 ans – a profondément marqué notre commune, aussi bien dans l’esprit de ses habitants que dans la chair de ses familles.

Au-delà de l’abject massacre d’une population tranquille et innocente, Paul Eluard a parfaitement résumé l’horreur de cette tragédie lorsqu’il écrivait à son ami, le sculpteur espagnol Fenosa :
« Ici, des hommes firent à leurs mères et à toutes les femmes, la plus grave injure, ils n’épargnèrent pas les enfants ».
En mémoire des 152 écoliers de l’ancien village d’Oradour, les élèves d’aujourd’hui auront une place particulière tout au long de cette cérémonie. Je tiens à les remercier, ainsi que leurs enseignants, pour leur implication dans l’hommage qui va être rendu tout à l’heure.
Je tiens également à saluer la classe Défense de l’Institution Beaupeyrat de Limoges pour sa présence, ainsi que ses deux encadrants pour leur engagement à faire vivre le devoir de mémoire.

Si par le passé – et notamment dans la période préparatoire au procès qui s’est tenu à Bordeaux en 1953 – notre association a eu de multiples occasions d’aller rencontrer vos prédécesseurs à Paris, vous êtes seulement le second Ministre de la Justice à être accueilli à Oradour.

Pourtant, en jetant un regard sur les huit décennies passées, les mots « Justice » et « Oradour » semblent deux termes difficilement conciliables, et qui dans tous les cas ne vont pas de soi.
Il y a quelques années, un journaliste a utilisé l’expression « d’inaudible justice » dans le cas d’Oradour, c’est ce qui semble en effet le mieux correspondre à cette relation.
Lors des salutations du maire il y a quelques instants, vous avez pu être surpris de la présence importante de représentants venus d’Alsace, parmi lesquels une délégation de Strasbourg conduite par son maire, ainsi qu’une délégation d’élus de la ville de Schiltigheim. Leur présence ici aujourd’hui est particulièrement symbolique et rappelle à chacun d’entre nous la déchirure qui a existé entre nos deux régions pendant des décennies.

En effet, le 12 janvier 1953, quasiment neuf ans après les faits, devant le tribunal militaire de Bordeaux, 21 soldats ayant participé au massacre d’Oradour sous l’uniforme de la Division S.S. Das Reich étaient présentés à leurs juges. Le besoin de justice des familles – malgré les lenteurs de la procédure et les multiples renvois – était énorme.
Pour autant, s’agissant d’une juridiction militaire, les familles n’ont pas pu se constituer partie civile. Avant même qu’il ne débute, ce procès annonçait déjà pour elles et pour les survivants une succession de déceptions. En plus, aucun officier responsable ne figurait sur le banc des accusés, seuls un adjudant et un sergent se partageaient les plus hauts grades, tous les autres n’étant que de simples soldats.
Comble du malheur pour la France de l’après-guerre, treize de ces soldats étaient des Alsaciens.
Par les ondes avec la voix de Frédéric Pottecher, et dans les colonnes des journaux sous la plume de Jean-Marc Theolleyre par exemple, les Français ont suivi avec passion ce procès pendant près d’un mois.
Deux mémoires s’y sont confrontées, deux crimes de guerre subis par des Français s’y sont opposés – le massacre d’Oradour-sur-Glane d’un côté et, de l’autre, le drame de l’incorporation de force vécu par l’Alsace.
Après des débats tendus, et pourtant admirablement menés par le président Marcel Nussy Saint-Säens, le verdict prononcé le 13 février 1953 décevait tout le monde. A Oradour, les peines étaient jugées insuffisantes et trop clémentes. En Alsace, au contraire, la condamnation à des peines de 5 à 8 ans de prison pour les 13 incorporés de force étaient totalement inadmissibles.
Pendant près d’une semaine, la France s’est trouvée déchirée par ces deux crimes de guerre. Le 21 février 1953, alors que l’encre du jugement était à peine sèche, alors que déjà, en plein procès, le législateur avait modifié la loi sur la responsabilité collective de 1948, le Parlement votait – au nom de l’unité nationale – une loi d’amnistie en faveur des 13 condamnés alsaciens.

Dans le cas d’Oradour, ce qui rend l’amnistie choquante, c’est qu’elle supprime rétroactivement le caractère d’infraction des faits. A Bordeaux, quelques jours plus tôt, dans son réquisitoire devant le tribunal militaire, le lieutenant-colonel Gardon avait eu cette citation presque prémonitoire, qui résume parfaitement la situation juridique créée par l’amnistie, en reprenant l’image de cette scène du Richard III de Shakespeare, lorsque le duc de Gloucester, couvert du sang du roi, supplie la reine : « Dites que je ne l’ai pas tué ! », et la reine de répondre : « Dites qu’il n’est pas mort ».
A Oradour, la conséquence de cette amnistie a bien supprimé l’infraction. Dans l’esprit des gens d’ici, dans l’esprit des familles, ce massacre resterait à présent le symbole du crime impuni.
En réfléchissant, avec le recul des décennies, sur ces deux crimes de guerre, il apparaît que la grâce aurait pu ne pas avoir ici les mêmes conséquences. Elle aurait permis, en effet, d’affirmer officiellement qu’il y avait bien eu un crime commis à Oradour, mais qu’au nom de circonstances exceptionnelles – dans les faits, cet autre crime de guerre abominable que fut l’incorporation de force – une dispense de peine était obligatoire, voire même naturelle.

A Oradour, il résultera de cette amnistie une rupture des relations avec l’État qui compliquera singulièrement la renaissance de cette ville martyre. À l’exception notoire du Général de Gaulle, le 20 mai 1962, aucun représentant de l’État ne sera plus reçu officiellement jusqu’en 1971.
Dès le vote de la loi d’amnistie, l’Association Nationale des Familles des Martyrs rend la Croix de la Légion d’Honneur et la Croix de Guerre attribuées aux victimes. Elle décide aussi de faire construire à ses frais un tombeau dans le cimetière pour recevoir les cendres des victimes et d’abandonner le monument érigé par l’État. Enfin, elle fait apposer à chaque entrée du village martyr la liste des parlementaires ayant voté la loi d’amnistie ainsi que les noms des 13 incorporés de force qui en avaient bénéficié.

Il faudra attendre le mois d’avril 1998, pour que de jeunes alsaciens soient accueillis au sein des familles d’Oradour. Malgré ce contexte douloureux entre nos deux provinces, un ancien « Malgré-nous » détenu en Russie au camp de Tambov, Charles Gantzer, avait souhaité de son vivant, rétablir le dialogue à la faveur d’un échange de jeunes.
Son initiative heureuse permit quelques mois plus tard au maire de Strasbourg de présider la cérémonie commémorative du 44ème anniversaire du massacre. Depuis, malgré ce passé difficile, les relations se sont apaisées tout en respectant la mémoire des victimes. Des élus d’Alsace ont su prendre le chemin d’Oradour, comme ceux d’ici ont su trouver celui de l’Alsace. En évoquant ces initiatives, je veux naturellement souligner, et saluer, la présence aujourd’hui des élus de Strasbourg et de Schiltigheim. Je veux aussi saluer Raymond Frugier, ancien maire d’Oradour, Marcel Darthout et Claude Milord, mes prédécesseurs, sans leur détermination et leur engagement, cette ouverture aurait été difficile.

La justice française n’a donc pas su apporter l’espérance qu’elle avait fait naître dans l’immédiat après-guerre au sein des familles. Par l’amnistie, le procès de Bordeaux fut discrédité et son souvenir déformé. Il en fut de même avec la justice allemande où, bien souvent, des raisons politiques, voire diplomatiques, ont empêché les tentatives de poursuite des criminels de la Division Das Reich.
Si notre amie allemande, l’historienne Andrea Erkenbrecher, nous a permis de connaître récemment toutes les actions qui ont été engagée en Allemagne de l’Ouest et en Allemagne de l’Est depuis la guerre, la justice rendue par les tribunaux allemands laisse cependant une certaine amertume et un sentiment d’inachevé.

D’une part, les plus hauts responsables du massacre, parmi lesquels le général S.S. Heinz Lammerding, n’ont jamais été inquiétés par la justice, ni jamais extradé malgré les demandes répétées de la France. Ce dernier – après avoir été entrepreneur dans le bâtiment toute sa vie – est mort en toute tranquillité dans son lit en 1971 à Düsseldorf.
Il faut attendre mai 1983 pour qu’un tribunal de Berlin-Est juge le sous-lieutenant Heinz Barth. Ce dernier reconnaît que le 10 Juin 1944 les ordres avait été donnés par le commandant Dickman, et qu’ils consistaient à détruire la localité et ses habitants, y compris femmes et enfants. Reconnu coupable, Barth fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Cependant, malgré ce jugement sévère, le condamné continua à bénéficier d’une pension d’anciens combattants. En raison d’une santé déclinante, il fut finalement remis en liberté en 1997.
Il mourut paisiblement à son domicile en août 2007.

En 2011, une nouvelle enquête est diligentée en Allemagne par le Parquet de Dortmund. Six soldats, encore en vie, voient leur domicile perquisitionné. Après plusieurs mois d’enquête, après une visite des ruines permettant encore de relever des impacts de balles sur certains murs, après l’audition de l’ensemble des témoins du massacre d’Oradour, le procureur Andreas Brendel inculpe, en 2013, l’un des mitrailleurs ayant participé, notamment, à l’exécution des hommes dans le Chais Denis et à celle des femmes et des enfants dans l’église. En juin 2015, malgré les éléments concordants apportés par le procureur, la Cour d’Appel de Cologne a prononcé un non-lieu en faveur de cet ancien S.S. estimant que sa participation ne pouvait pas être clairement établie.

Au final, on peut s’interroger sur ce que peut représenter la justice après un tel crime. Est-ce vraiment la justice au sens du droit appliqué que demande les victimes ? Est-ce qu’on ne court pas le risque d’être forcément déçu par la réponse qu’apportera la justice ? Et, au final, quel sens a la justice pour la nouvelle génération qui vit aujourd’hui à Oradour ?

Peut-être la réponse à ces questions était-elle déjà dans le message lu par le préfet régional, le 21 juin 1944, au cimetière où les victimes venaient d’être inhumées :
« Quelles que soient les raisons invoquées, rien ne peut justifier le caractère effroyable de ce drame, contraire à la convention de La Haye, contraire aux lois françaises et allemandes […]. Adieu, habitants d’Oradour-sur-Glane […]. Nous jurons sur vos tombes que nous ne reculeront devant aucun effort pour empêcher qu’à l’avenir d’autres subissent votre sort. Ce sera là toute notre raison d’être : que votre martyr serve à sauver les vivants ».
Dans des termes tout à fait similaires, le général de Gaulle, déclarait ici, quelques mois plus tard, le 4 mars 1945 :
« Oradour est le symbole des malheurs de la Patrie. Il convient d’en conserver le souvenir, car il ne faut plus jamais qu’un pareil malheur ne se reproduise ».

C’est le sens de l’hommage rendu aux victimes aujourd’hui, c’est le sens de notre engagement à porter leur mémoire, non pas seulement en se rappelant du martyre qu’elles ont subi, mais en portant leur souvenir pour que d’autres n’aient pas à vivre un tel calvaire.
De même, qu’en tirant les leçons des jours qui ont suivi la tragédie, d’autres – dans des circonstances semblables – puissent bénéficier d’un soutien psychologique qui fut oublié ici, d’une reconstruction de leurs habitations qui les prendrait en compte, d’une meilleure réponse à leur besoin de justice.
Aujourd’hui, par votre présence Monsieur le Ministre, avec les représentants de l’Alsace, avec Mme la Consule générale d’Allemagne, avec notre ami le maire de Dachau, Florian Hartman, avec une délégation importante d’élus du Bezirk de Moyenne Franconie, parmi lesquels notre ami le maire d’Hersbruck, Robert Ilg, avec toutes les délégations et le public présent, nous savons que le plus bel hommage, la meilleure justice que nous puissions rendre aux victimes d’un tel massacre 78 ans après, c’est de s’unir ensemble pour construire sur notre sol européen, un espace de paix et de sécurité.
Cette conviction, cet engagement européen, ont été ici renforcés par la visite, le 4 septembre 2013, du président allemand Joachim Gauck, accompagné de son homologue le président Hollande, venu officiellement reconnaître le crime de guerre perpétré ici par « une unité sous commandement allemand » afin que puisse naître « un chemin vers l’avenir, un avenir commun, un avenir pacifique et dans le partenariat entre la France et l’Allemagne ».
Ainsi, notre idéal européen, fondé sur la liberté, la dignité de l’homme, la justice et la solidarité, est né des cendres de la Seconde guerre mondiale. Avec les délégations présentes ici aujourd’hui, notre histoire européenne s’inscrit aussi bien dans les massacres d’Oradour et de Maillé, qu’à travers les déportés de Tulle à Dachaü, les détenus du Camp des Milles à Aix-en-Provence ou ceux du camp d’Hersbrück dépendant de celui de Flossenbürg.
Demain, il nous faudra aussi inclure dans cette histoire et dans cette mémoire européenne, les crimes perpétrés actuellement en Ukraine, les images de Boutcha ou de Kramatorsk nous rappellent tellement celles qu’Oradour donnaient à voir au lendemain du massacre.

Puissions-nous aujourd’hui, dans la cérémonie que nous allons vivre ensemble dans quelques minutes en mémoire des martyrs d’Oradour, avoir aussi une pensée pour les victimes civiles de ce conflit aux portes de l’Europe, ainsi que pour les victimes des attentats de Paris du 13 novembre 2015 dont le verdict du procès est attendu dans quelques jours.

Je vous remercie.

Benoît SADRY
Président de l’Association Nationale des Familles des Martyrs

Oradour-sur-Glane, le 10 juin 2022

Le Ministre a assuré aux représentants des familles avoir entendu ce message fort, avoir conscience des manquements de la justice. Souhaitant s’exprimer officiellement pour l’Histoire, il a émis le vœu d’organiser une cérémonie à la Chancellerie avec les familles et descendants.

Récits d’Oradour de Jérôme Amimer

Ce documentaire a été projeté au Ciné-Bourse à Saint-Junien le 26 avril, en présence de l’auteur, de deux des personnes qu’il a enregistrées, de Robert Hébras et de Philippe Lacroix, maire d’Oradour.
Gravité, subjectivité et universalité du message, voilà ce que perçoit le spectateur.
Grave est le regard porté sur les ruines qui sont filmées en plans longs et fixes, dans un noir et blanc intemporel et par l’insertion de documents photographiques, sans commentaire superflu ; ce parti pris dépasse l’esthétisme, évite le pathos et exprime le respect dû à ce lieu hanté par le souvenir des 642 victimes du 10 juin 1944.
Graves et subjectifs sont les propos de l’auteur et des quatre intervenants qu’il a retenus.
Jérôme Amimer marqué par le destin de sa grand-mère russe, survivante d’un massacre au sud de Pskov, lie l’évocation de ce passé familial à sa représentation du drame d’Oradour, un « monument intérieur » dans son espace mental.
Jean-Michel Ducouret, en tant que guide, témoigne de l’atmosphère de recueillement qui a prévalu et prévaut encore dans la visite, entre pèlerinage et tourisme de mémoire. Relatant les travaux de consolidation et d’entretien, il insiste sur l’importance de la conservation des ruines.
Héloïse Belloir, historienne, rejoint cette préoccupation, inquiète de l’avenir d’un lieu érodé par le temps et la reprise de la vie. Dans son étude des « monuments et documents non intentionnels », traces à partir desquelles se construit la mémoire, elle a trouvé matière à Oradour dans les objets de la vie quotidienne, recueillis, réintroduits, mis en scène, sacralisés en reliques des martyrs : des documents à contextualiser, des indices de vies fauchées par le massacre.
Claude Milord, président de l’Association des familles de martyrs d’Oradour, rappelle les relations avec l’État, en particulier la rupture après le procès de Bordeaux, à l’issue duquel les incorporés alsaciens furent amnistiés (et non « graciés »). Il insiste sur la « solidarité » envers et entre les familles et sur le poids du deuil qui marque durablement cette « communauté de souffrance ».
Benoît Sadry, élu municipal, aborde le long chemin de l’apaisement dans l’opinion des habitants, avec la réception de personnalités nationales, le rapprochement avec l’Alsace et l’Allemagne, la mise en place de la statue de Fenosa (refusée par l’évêché, et non par la commune) ; des habitants auparavant écartés des décisions de la reconstruction, « dépossédés de leur village » et sans soutien psychologique en ce temps-là.
Des « récits » particuliers, où affleure l’émotion, parfois discutables, mais légitimes, suscitant la réflexion.
Points de vue personnels mais de portée universelle, érigeant Oradour en symbole, « miroir d’autres désastres », contemporains (innombrables massacres du front oriental) et aussi actuels, des crimes qui frappent l’humanité toute entière.
Dans le débat qui a suivi la projection, Robert Hébras a tenu à rappeler que, pendant neuf ans, les habitants d’Oradour, logés en baraquements, ont subi l’épreuve de la traversée quotidienne du village en ruine.
En conclusion, Jérôme Amimer livre une œuvre utile, posant à plusieurs voix l’enjeu de la transmission (aucun des interlocuteurs n’a vécu l’évènement), un questionnement significatif de la transition entre le temps des témoins et celui des nouvelles générations pour qui le sens des ruines d’Oradour devra perdurer. C’est déjà la mission des services des Monuments historiques et du CMO, un devoir d’histoire.

Philippe Pommier

Projection du film « Maillé, le massacre oublié » Espace Cité

Le musée de la Résistance de Limoges, en partenariat avec l’Office national des Anciens Combattants de la Haute-Vienne et l’Association « Oradour. Histoire, Vigilance et Réconciliation » (OHVR) organise la projection du film « Maillé, le massacre oublié » :

Jeudi 16 novembre à 18h30 à l’Espace Cité
2, rue de la Providence à Limoges.

Le 25 août 1944, Paris est libéré. Ce même jour une unité SS pénètre dans le bourg de Maillé en Touraine et l’encercle.
Hommes, femmes, enfants sont systématiquement massacrés et les bâtiments incendiés. 124 victimes âgées de 3 mois à 89 ans périssent.
Le film retrace ce massacre à travers les témoignages de rescapés, dont la plupart n’avaient pas 15 ans à l’époque.
La projection du film sera suivie d’une discussion avec Serge Martin, rescapé du massacre de Maillé et président de l’association pour le Souvenir de Maillé et Romain Taillefait, responsable de la maison du Souvenir de Maillé.

Robert Hébras, survivant du massacre d’Oradour-sur-Glane, sera également présent.

Entrée Libre

Le prix du Citoyen Européen décerné à Robert Hébras

Le prix du Citoyen Européen est, depuis 2008, décerné chaque année par le Parlement européen à ceux qui, par des projets ou initiatives, facilitent la coopération transnationale et promeuvent les valeurs européennes.
En 2017, le député européen Jean-Paul Denanot a soutenu la candidature de Robert Hébras qui, depuis de nombreuses années, œuvre pour la réconciliation entre la France, l’Allemagne et l’Autriche tout en maintenant vivante la Mémoire des 642 victimes du massacre d’Oradour-sur-Glane le 10 juin1944.
Le 27 septembre 2017, Robert Hébras et trois autres lauréats ont reçu leur médaille au bureau du Parlement européen à Paris.

 

Ce fut l’occasion pour Robert Hébras d’insister sur la nécessité d’une construction européenne solide, volontaire dans un monde « où Oradour se reproduit trop souvent ».

En octobre, avec ses homologues de 25 pays de l’Union Européenne, il sera de nouveau honoré lors d’une cérémonie au Parlement européen à Bruxelles.

Article publié par le journal Le Populaire du Centre
le 29 septembre 2017

 

 


La Maison de l’Europe- Centre Europe Direct Limousin a tenu à fêter cette distinction le 7 octobre 2017. Elle a choisi, pour cette manifestation, le cadre du Salon international du dessin de Presse de l’Humour de Saint-Just-le-Martel.
C’est devant l’exposition « Décoder les Etoiles » où cinquante dessins de presse évoquent les enjeux d’un demi siècle de politique européenne, que la présidente, Lucile Valadas, a remercié puis félicité Robert Hébras pour cette « distinction largement méritée. ».
Le député européen, Jean-Paul Denanot, en joignant ses remerciements a rappelé le rôle essentiel tenu par Robert Hébras, inlassable militant pour la paix et la réconciliation, tout en n’oubliant pas le passé. Un long engagement qui justifie pleinement le prix décerné à un « grand citoyen européen ».
Heureux, Robert Hébras rappelle qu’il fait « son devoir d’Homme ».

Jean Marcel Darthout est décédé le 4 octobre 2016

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« Je n’oublierai jamais cet homme avec lequel j’ai survécu au pire et espéré le meilleur ».
Par ces quelques mots Robert Hébras résume le destin des deux derniers survivants de la grange Laudy où ils furent mitraillés le 10 juin 1944 par les Waffen SS de la division Das Reich.
Depuis plusieurs années la santé de Jean Marcel Darthout ne lui permettait plus de mener, aux côtés de son compagnon, le travail de Mémoire et l’effort de Réconciliation, entretenus et souhaités par ces deux témoins.
Le poids de porter leur message commun, ne pas oublier mais œuvrer pour construire une mémoire apaisée, revient désormais à Robert Hébras, seul.

Robert Hébras promu Officier dans l’ordre des Palmes Académiques

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Monsieur le Préfet du Limousin, Préfet de la Haute-Vienne lui a remis cette distinction le 28 novembre 2015.
Depuis des années Robert Hébras, rencontre écoliers, collégiens, lycéens, étudiants français et étrangers notamment Allemands.
« J’essaie à mon modeste niveau de transmettre la mémoire des faits et des 642 victimes. J’apporte à tous ces jeunes mon témoignage accompagné des valeurs qui me tiennent à cœur, tolérance et vigilance, plus que jamais indispensables ».

 

Chaleureuses félicitations à Robert Hébras !

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